Mon parrain, avant de souffrir d’une maladie similaire à la maladie d’Alzheimer, racontait ce gag d’un malade se rendant chez son médecin :
« A la fin de la consultation, le médecin lui dit qu’il a une bonne et une mauvaise nouvelle et lui demande laquelle il veut connaître en premier.
-La mauvaise, répond le patient.
-Eh bien, lui dit le médecin, vous souffrez de la maladie d’Alzheimer.
-Et quelle est donc la bonne nouvelle, lui demande le patient plein d’espoir ?
-Lorsque vous sortirez de mon cabinet, vous ne vous en souviendrez plus ! ».
Ce que je vis en ce moment avec ma maman m’inspire une nouvelle version :
« Un malade d’Alzheimer se rend chez son médecin. A la fin de la consultation, ce dernier lui dit qu’il a une bonne et une mauvaise nouvelle et lui demande laquelle il veut connaître en premier.
-La bonne, répond le patient.
-Eh bien, lui dit le médecin, vous allez guérir de la maladie d’Alzheimer.
-Et quelle est donc la mauvaise, lui demande le patient inquiet?
-Vous deviendrez de plus en plus conscient de ce que vous oubliez! ».
Dans l’évolution de la maladie, il y a une phase particulièrement difficile où l’on se rends compte que tout ne tourne pas rond. Ma maman avait déjà passé cette phase et ne se rendait plus compte qu’elle était malade. Depuis quelques semaines elle s’en rend de nouveau compte et ce n’est pas facile pour elle.
J’ai vécu l’évolution de la maladie de mon parrain, atteint de démence fronto-temporale, comme une longue descente, où des capacités paraissant aller de soi, disparaissaient les unes après les autres. Après chaque pallier, je m’en voulais de ne pas avoir vu tout ce qu’il était encore capable de faire à l’étape précédente ! C’est comme s’il était en train de mourir par petites parties. Et on peut se dire ce qu’on veut pour essayer de se consoler, c’est un processus affreux et révoltant !
Aujourd’hui, il m’est donné de voir le processus inverse avec ma maman et j’en suis si reconnaissante ! Et en même temps je me dit : « si on avait su à l’époque où mon parrain était malade, que de souffrance on aurait pu éviter ! ».